La dépression chez l’ado : quels signes ?
Maladie psychique, la dépression peut être due à plusieurs facteurs. Si elle provoque en général des symptômes caractéristiques, il est parfois difficile de détecter les signes d’une dépression chez l’enfant et l’adolescent. Alors comment savoir si son ado souffre de dépression ?
Des symptômes parfois difficiles à repérer
Qu’elle touche un adulte, un enfant ou un adolescent, la dépression est une véritable maladie psychique (la plus fréquente aujourd’hui). Tristesse permanente, manque d’entrain et de motivation, perte d’énergie et fatigue…
Elle est à l’origine d’une profonde détresse et de perturbations de l’humeur. La dépression doit être distinguée d’un simple épisode de déprime, d’une baisse de moral ou de motivation, ou d’une tristesse passagère. Les symptômes s’installent en effet sur une longue période (les épisodes dépressifs durent au moins deux semaines), et ont un retentissement sur plusieurs aspects du quotidien.
Puberté et transformation du corps, modification du rapport au monde et aux autres, premiers émois amoureux et découverte de la sexualité, deuil de l’enfance… L’adolescence reste une période de vulnérabilité, perturbée et perturbante. Elle est particulièrement propice aux troubles dépressifs, et les causes de la dépression chez les jeunes sont nombreuses. Mais si la dépression provoque plusieurs symptômes caractéristiques chez l’adulte, cette maladie est parfois difficile à détecter chez l’adolescent. Elle peut facilement passer inaperçue.
En effet, les jeunes ont souvent du mal à exprimer leurs émotions et leurs ressentis. Certains comportements (irritabilité et agressivité, par exemple) peuvent parfois être pris pour de simples « sautes d’humeur ». Les petites périodes de déprime et d’instabilité émotionnelle sont également courantes pendant la « crise d’adolescence » (une période marquée par de nombreux bouleversements hormonaux et de multiples transformations). Certains signes doivent néanmoins alerter.
Quels sont les signes qui doivent alerter ?
Chez l’ado, la dépression peut provoquer plusieurs types de symptômes :
-
des troubles de l’humeur : une profonde tristesse, un abattement et une perte de motivation, des pleurs fréquents… L’adolescent peut être colérique et agressif, ou au contraire sans entrain et indifférent. « Le tout premier symptôme de la dépression adolescente, le plus flagrant, c’est un désinvestissement rapide et brutal de tout ce que l’adolescent(e) faisait et qui, jusque-là, lui apportait du plaisir et de l’épanouissement », explique le Pr Marie Rose Moro, pédopsychiatre et responsable de la Maison de Solenn à Paris. « Hobbies, passions, école, copains… Soudain, rien de tout cela ne l’intéresse plus. ‘Il ou elle n’est plus comme avant…’ Souvent, c’est la première chose que les parents de ces enfants nous racontent. » L’adolescent se dévalorise et perd confiance en lui. Il ressent un sentiment de culpabilité et a l’impression de ne pas être aimé. Il peut avoir des idées suicidaires ;
-
des symptômes physiques : l’adolescent dépressif souffre souvent de troubles du sommeil et de l’alimentation. « Les parents s’étonnent parfois que leur ado dorme trop, fasse des grasses matinées… ce qui est tout à fait normal ! Ce qui ne l’est pas, par contre, c’est un jeune qui se réveille à trois heures du matin et qui ne parvient plus à se rendormir. Ces réveils nocturnes sont un signe majeur de dépression. » Quant aux troubles alimentaires, ils sont particulièrement fréquents chez les filles. « Outre l’anorexie et la perte de poids liée, on peut également observer une prise de poids rapide et conséquente. Le jeune mange tout et n’importe quoi pour se remplir, essayer de combler ce vide qu’il ou elle ressent. » Autre signe d’une dépression déjà bien avancée, un ralentissement moteur généralisé. Votre ado est anormalement lent : il met un temps fou pour se lever, se préparer, marcher… À ce stade, ces signes doivent amener à consulter ;
-
des difficultés à se concentrer, des pertes de mémoire, un désinvestissement scolaire soudain, un isolement social (avec l’arrêt des activités de loisir) ;
-
des comportements provocants et nuisibles pour sa santé : abus d’alcool, de drogues et de médicaments, usage abusif d’internet, de réseaux sociaux et de jeux vidéo, comportements sexuels risqués, fugues, délinquance, automutilation…
Difficultés ou réticences à discuter, troubles du sommeil, crises de pleurs, idées noires et absentéisme scolaire… Tous ces troubles doivent amener à consulter un médecin.
Ado dépressif : que faire ?
Si elle n’est pas diagnostiquée et prise en charge, la dépression peut rapidement se compliquer, avec l’apparition d’autres troubles psychiatriques et de conduites à risque. Il est donc essentiel de consulter en cas de doutes. Une fois le diagnostic confirmé, le médecin peut prescrire le traitement adapté.
Accompagner l’adolescent et consulter un médecin
Si la maladie n’est pas diagnostiquée et traitée, elle peut mener à des comportements dangereux et nocifs. « Les conduites addictives sont très souvent associées à la dépression », explique le Pr Moro. « Ces enfants sont dans un tel état de souffrance qu’ils essaient à tout prix de l’anesthésier ou, au moins, de la fuir. Au début, l’alcool et/ou les drogues ont cet effet-là, ça « marche »… mais seulement au début ! Car c’est un leurre : très vite, l’addiction aggrave le problème. »
Il n’est pas rare non plus que l’ado soit également très anxieux et qu’il développe des phobies, comme la phobie scolaire. Se sentir en tel décalage avec autrui, ne plus être « comme les autres » rend leur fréquentation intolérable. « Et un adolescent qui fuit ses pairs, qui s’isole est un signe inquiétant », insiste le Pr Moro.
En tant que parent, que faire face à un adolescent qui, visiblement, ne va pas bien ? Comment le convaincre de se faire aider ? « Tout d’abord, soyez-en convaincu(e) vous-même ! », conseille le Pr Moro. « Quand il a la grippe, vous ne lui demandez pas son avis pour aller voir un médecin. Ici, c’est pareil ! Dites-lui qu’il ou elle ne va pas bien et que vous allez ensemble voir un psychiatre ou consulter dans une Maison des Adolescents. Car si vous devez attendre qu’il ou elle soit prêt(e), d’accord, ait choisi quelqu’un… vous n’êtes pas sorti(e) de l’auberge ! Le fait de l’accompagner est important, car, bien souvent, même si c’est difficile à admettre, la situation familiale et l’ambiance à la maison ne sont pas pour rien dans la survenue d’une dépression. »
Poser le bon diagnostic
Comme évoqué plus haut, il est parfois difficile de diagnostiquer une véritable dépression chez l’ado. La Haute Autorité de Santé (HAS) a donc publié des recommandations pour aider les médecins à repérer les signes de dépression chez l’adolescent et à poser le bon diagnostic. Ces recommandations leur permettent également d’indiquer la prise en charge la plus adaptée.
Pour confirmer son diagnostic, le médecin se base principalement sur les symptômes décrits par l’adolescent. Il doit donc instaurer un climat de confiance avec celui-ci, et lui proposer une approche emphatique et collaborative. Le médecin prend en compte les éventuels facteurs de risque (environnement de l’adolescent, antécédents personnels et familiaux, signes de risque suicidaire…). Il interroge ensuite l’adolescent sur ses symptômes. Le diagnostic de dépression est confirmé lorsqu’au moins cinq symptômes sont ressentis par l’adolescent (avec au moins un des deux symptômes principaux : l’humeur dépressive ou la perte d’intérêt), depuis au moins 15 jours.
Le médecin évalue ensuite le degré de sévérité de la dépression (légère, modérée ou sévère), ainsi que ses principales manifestations et caractéristiques.
Quels traitements chez l’adolescent ?
Pour traiter la dépression chez l'adolescent, il faut d’abord évaluer la sévérité de ses symptômes (dépression légère, modérée ou sévère) et leurs causes. La prise en charge doit être adaptée : en plus de protéger l’adolescent (contre une éventuelle crise suicidaire), elle doit l'aider à retrouver confiance en soi.
Le traitement repose principalement sur :
-
le suivi d’une psychothérapie : il existe plusieurs types de psychothérapies, qui répondent à différents besoins et s’adaptent au profil de chaque individu. Basées sur l’empathie et le dialogue, elles permettent de faire régresser les symptômes, de prévenir les récidives et parfois d’obtenir une rémission totale. La dépression chez l’ado peut être liée à des difficultés relationnelles avec les parents : ces derniers doivent donc s’impliquer dans la thérapie si cela est nécessaire ;
-
la prise de médicaments antidépresseurs : si les séances de psychothérapie ne suffisent pas à faire disparaître les symptômes, ou si la dépression est sévère et durable, une prise en charge médicamenteuse peut être envisagée. Le traitement doit être prescrit par un pédopsychiatre, et une surveillance étroite est mise en place pendant les premières semaines ;
-
une hospitalisation : elle n’est réservée qu’aux situations graves (en présence d’un risque de passage à l’acte suicidaire, notamment), ou sur recommandations d’un psychiatre ou d’un pédopsychiatre.
Les autres troubles psychiatriques chez l’adolescent
Entre 10 et 15 % des adolescents présenteront des troubles psychiatriques. Dans l’ordre, les principaux sont la dépression, les conduites addictives graves (toxicomanie, alcoolisme…), et les troubles psychotiques, comme la schizophrénie (1 à 2 % de la population adolescente).
Les Maisons des Adolescents (MDA) sont des structures d’accueil, de conseils et de soins destinées aux adolescents. Il y en a au moins une par département. Vous pouvez trouver la liste complète des MDA en France sur https://www.anmda.fr.
Sources :
https://www.vidal.fr/maladies/chez-les-enfants/depression-enfant-adolescent.html